Commémoration du 10 mai

Comme tous les ans, la Fondation a commémoré le retour des cendres du Maréchal Lyautey aux Invalides à Paris.

Discours de Claude Jamati Invalides

Mot d’accueil aux personnalités civiles et militaires présentes et représentées :

La mairie du 7ème arrondissement de Paris représentée par la Maire adjointe Josiane Gaude , Dominique Potier, Député Meurthe et Moselle, l’ambassade du Maroc représentée par Nadia Zakari, ministre plénipotentiaire, le Président du Souvenir Français représenté par Serge Mucetti, Délégué de Paris, la Koumia, représentée par son vice-président Louis Jean Duclos et Martine Dubost, Thierry Le Cam, Président du Réseau Baden Powell (scoutisme)

Le Général de Saint Chamas, Gouverneur des Invalides, le gouverneur militaire de Paris représenté par le lieutenant-colonel, chef de cabinet adjoints, un détachement du 1er régiment de spahis de Valence dont une trompette et plusieurs porte-drapeaux deux porte-drapeaux de la corniche Gouraud (lycée Stanislas)

3 gerbes ont été déposées : Mairie du 7ème, Koumia, Fondation Lyautey

Tout d’abord, je vous remercie sincèrement d’avoir répondu à notre invitation et d’être présents aujourd’hui pour cette cérémonie annuelle rendant hommage au Maréchal Lyautey.

Mon propos s’articulera autour de 4 axes : l’homme et les liens France Maroc, son héritage et son patrimoine, le rôle de la Fondation Lyautey, et enfin la signification de cette commémoration

L’homme et les liens France-Maroc

Le Maréchal Lyautey, né à Nancy en 1854 et mort en 1934 à Thorey-Lyautey, était un militaire ayant effectué une brillante carrière en France et Outre-Mer. Mais, comme il l’a dit :

« Celui qui n’est que militaire n’est qu’un mauvais militaire, celui qui n’est que professeur n’est qu’un mauvais professeur, celui qui n’est qu’industriel n’est qu’un mauvais industriel. L’homme complet, celui qui veut remplir sa pleine destinée et être digne de mener des hommes, être un chef en un

mot, celui-là doit avoir ses lanternes ouvertes sur tout ce qui fait l’honneur de l’humanité. »

Lyautey fut un exemple, un symbole et une référence. Il fut tour à tour et tout à la fois soldat, pacificateur, diplomate, administrateur et urbaniste, écrivain et protecteur des arts et dans tous les cas un phare pour la jeunesse, notamment comme président d’honneur de toutes les fédérations du scoutisme en France. Et ces qualités, il les a particulièrement mises en valeur, alors qu’il fut premier résident général de France au Maroc de 1912 à 1925 à la suite de la signature du traité de protectorat avec le Maroc. Là-bas, dans une conjoncture parfois difficile, il jette les bases du Maroc moderne, tout en respectant son Sultan, ses traditions, sa religion, son patrimoine culturel et architectural. Clairvoyant, il va doter le pays des infrastructures indispensables à son évolution économique et sociale avec le dessein avoué de l’amener à l’indépendance dans les meilleures conditions. Il a toujours privilégié ce qui unit plutôt que ce qui divise. Comme me l’a dit un ami Marocain, ton oncle Hubert, il a fait du « développement durable ».

Inès Lyautey, son épouse, femme d’exception, fut un soutien solide et une des pionnières de l’action humanitaire, au Maroc et en France. Nous lui avons rendu hommage à Thorey-Lyautey à l’occasion de la journée internationale des droits

de la femme, lors de l’inauguration de sa tombe.

 d’amitié France-Maroc, pays où j’ai travaillé et que j’aime. Ces liens, ils ont bien besoin d’être

Je m’inscris dans la continuité de ces liens forts

Son héritage et son patrimoine

L’héritage de Lyautey est toujours d’actualité, tant au niveau de ses idées que des actions qu’il a conduites. Nous nous appuyons en particulier sur le patrimoine Lyautey que constituent le château de Thorey-Lyautey, près de Nancy et les collections qu’il accueille. Ce lieu est à mon sens un lieu symbolique où doivent être cultivés les liens France Maroc dont j’ai parlé. Le château de Thorey- Lyautey est une parcelle de Maroc en France

Notre mission

Faire vivre la mémoire et l’œuvre du Maréchal Lyautey, c’est la mission de la Fondation Lyautey et de l’Association nationale Maréchal Lyautey, que je préside. Rappelons que la Fondation et l’association doivent leur existence à un homme, le Colonel Pierre Geoffroy, mon prédécesseur qui m’a demandé de reprendre le flambeau. Il a fait en sorte que le Château soit acheté par la Fondation en 1980. Gérée par les bénévoles engagés et motivés qui m’entourent et que je remercie chaleureusement, elle rassemble plusieurs centaines de membres. Nous appliquons notre feuille de route : « communiquer/rassembler, restaurer, financer ».
Nous c’est notre bureau exécutif : Alain Vauthier, le Général Paulus, Patricia Geoffroy, Jean-Pierre Arbey, Daniel Lecomte, et Philippe Grange, ainsi que des membres actifs de notre conseil d’administration comme Serge Mucetti et Arnaud de la Motte Rouge.

En 2022 et 2023, la mémoire de Lyautey et celle de son épouse furent et seront honorées à de nombreuses reprises depuis notre précédente cérémonie aux Invalides :
– 13 mai 2022, 110ème anniversaire de l’arrivée de Lyautey à Casablanca par la porte de la Marine et même itinéraire que pour les premiers pas du résident général, 100ème anniversaire du lycée Lyautey, établissement d’enseignement secondaire le plus important dans le monde (8600 élèves). – 14 juillet 2022, célébration du 100ème anniversaire de la remise de son bâton de maréchal à Lyautey par Alexandre Millerand, président de la République, décédé le 6 avril 1943, Millerand qui a joué un rôle essentiel dans la carrière de Lyautey, et inauguration de la salle Lyautey au consulat général de France à Casablanca ainsi que dévoilement d’une plaque commémorative.

– 19 octobre 2022 : 100ème anniversaire de la pose de la première pierre de la Grande mosquée de Paris, construite sous l’impulsion du Sultan Moulay Youssef et Lyautey.
– début mars : visite au Lycée Militaire d’Aix en Provence et au 1er régiment de Spahis : les liens sont renoués.

– début 2023 : élagage des arbres dangereux du Parc, préparation de dossier pour la prochaine tranche de travaux.
– 9 mars 2023 : conférence sur Mme Lyautey par Marie José Chavenon. au Souvenir français.
– 10 mars : cérémonie au château et au cimentière de Thorey-Lyautey pour la restauration de la tombe de Mme Lyautey avec présence du Secrétaire Général de la Préfecture, du Consul Général du Maroc, du Président général du Souvenir Français, du Directeur de la Croix-Rouge et de nombreux élus

– Juin 2023 : mise en ligne du nouveau site internet www.lyautey.fr
– 9 juillet : assemblée générale de l’ANML. Plaque rendant hommage au Colonel Geoffroy.

Notre bulletin « Présence de Lyautey » parait 3 fois par an, avec à chaque fois un dossier spécial. Nos partenariats avec le Souvenir Français et avec le réseau Baden Powell vivent. D’autres sont en cours de montage : 1er Spahis, lycée militaire d’Aix et Académie du Royaume du Maroc. Notre Fondation s’active enfin pour mobiliser plusieurs acteurs autour d’un projet culturel que nous avons initié.

Signification de cette commémoration

Les cérémonies organisées par les gouvernements français et marocain pour le transfert des cendres du Maréchal Lyautey, depuis le mausolée de Rabat, où il reposait depuis 1935, pour Paris, sont initiées le 22 avril 1961. Leur point d’orgue est l’inhumation provisoire à l’Hôtel national des Invalides dans la crypte des gouverneurs de la cathédrale Saint-Louis, puis l’inhumation définitive dans le sarcophage le 22 mars 1963.

La cérémonie présidée par le Général de Gaulle eut lieu le 10 mai 1961. La Fondation Lyautey et l’Association nationale Maréchal Lyautey, ont choisi cette date pour, chaque année à Paris, rendre hommage au Maréchal et commémorer son souvenir. Rappelons que cette statue de Lyautey, sa première statue en France fut érigée en 1984 au cœur de Paris pour le 50ème anniversaire de sa mort par l’Association et la Fondation Lyautey et que la ville de Paris a financé 50% de son coût. La cérémonie d’aujourd’hui est un symbole fédérateur de toutes celles et tous ceux qui restent attachés au Maréchal, à son action exceptionnelle ainsi qu’aux liens d’amitié et de fraternité qui lient la France et le Maroc pour construire l’avenir et mieux vivre le temps présent.

Discours de Serge Mucetti Dôme des invalides

Ancien consul général de France à Rabat et encore récemment consul général de France à Casablanca, c’est pour moi un grand honneur de me trouver aujourd’hui, en ce lieu, en ma double qualité d’administrateur de la Fondation Lyautey et de délégué général du Souvenir français de Paris.

Que pourrai-je ajouter aux propos de notre président ? si ce n’est qu’il y a 60 ans, le 22 mars 1963, la dépouille mortelle du maréchal Lyautey était remontée du caveau des gouverneurs où elle se trouvait depuis le 10 mai 1961, pour recevoir sa sépulture définitive.

Curieuse errance en vérité qui trouvait ainsi son terme en ce maussade matin de printemps, comme aujourd’hui, avec cette troisième mise au tombeau, après pas moins de dix services funèbres et deux traversées de la Méditerranée. Elle quitte le voisinage de Franchet d’Espérey, Fayolle et Maunoury pour rejoindre celui de Foch. Car, depuis le rétablissement de la dignité de maréchal de France en 1916, une loi du 27 mars 1929 permet à ses titulaires d’être inhumés aux Invalides sauf avis contraire de leur famille, ce qui est notamment le cas de Joffre.

Monsieur le Maréchal, veuillez, pardonner mon audace et la liberté avec laquelle je m’adresse à vous. Je devine votre fureur à vous trouver sous ces voutes. Car, à en croire Maurice Martin du Gard, vous vous seriez un jour écrié : « Je ne veux pas dormir à la métropole. Pour les Invalides, jamais ! Il y a trop de mauvaises rencontres. Je déteste Napoléon. J’appartiens au duc d’Enghien. Si Rabat décidément m’est refusé, jetez-moi à la mer. »

Mais, « solutionniste » dans l’âme, vous portez trop haut le sens du devoir pour vous dérober. La proximité de votre ami Foch, grand admirateur de l’Empereur qui lui dédia des mots inoubliables lors du centenaire de sa mort en 1921, a dû vous mettre du baume au cœur, à vous qui avez été contraint de vous plier au rite de l’éloge de votre prédécesseur à l’Académie française, Henri Houssaye, un des plus célèbres historiens de l’Empire de son temps, à vous qui avez partagé de longues années avec votre épouse, très attachée à la famille impériale, à vous qui avez habité de longues années au 5 rue Bonaparte.

Si vous goûtez peu les honneurs rendus à la mémoire de l’Empereur le 5 mai de chaque année, comme nous l’avons fait vendredi dernier, sans doute avez-vous été réconforté par la présence du comte et de la comtesse de Paris en ce 22 mars 1963 dont vous avez fréquenté la famille dans son exil de Larache, venus vous témoigner l’affection de la Maison de France.

Aux Invalides, vous prenez naturellement place dans le prestigieux cortège de braves, comme Turenne, Vauban, Marceau, Bertrand, Duroc et bien d’autres, qui ont forgé l’éternelle gloire des armes de la France.

Le 22 mars 1963, Saint-Cyriens et Spahis vous rendent les honneurs devant un brillant parterre composé de vos compagnons d’armes, d’officiers généraux, de vos collègues de l’Académie française, d’ambassadeurs dont ceux du Maroc, du Vietnam et de Madagascar qui assistent à cette cérémonie insolite de six légionnaires introduisant votre cercueil dans son enveloppe de bronze décorée de rameaux d’olivier et non de chêne.

Sur les côtés, figurent deux des citations déjà inscrites sur le piédestal monumental de votre statue, dans le parc du consulat général de France à Casablanca, que j’ai eue sous les yeux ces trois dernières années.

La première

La première, en français, est extraite d’une lettre adressée à Antonin de Margerie, le 15 août 1896 « être un de ceux auxquels les hommes croient, dans les yeux desquels des milliers d’yeux cherchent l’ordre a la voix desquels des routes s’ouvrent des pays se peuplent des villes surgissent » (En vérité lorsqu’il écrit ces lignes, Lyautey est en proie aux incertitudes et au doute. Car à quarante-deux ans, il piaffe et ronge son frein, déçu de n’avoir encore pu encore donner sa pleine mesure. Or, comme le dit Arnaud Teyssier, un des meilleurs biographes de Lyautey, isolée de son contexte, amputée de son début et de sa suite, la signification de la phrase s’inverse : elle exprime la satisfaction du proconsul bâtisseur d’empire qui, au faîte de sa puissance, n’a qu’un geste à faire pour faire jaillir le progrès).

La deuxième

La deuxième, en arabe, est tirée du discours prononcé « au congrès des hautes études marocaines, à Rabat, le 7 décembre 1922, : « Plus je fréquente les indigènes plus je vis dans ce pays plus je suis convaincu de la grandeur de cette nation » (C’est une déclaration d’amour au Maroc, une allégeance morale à ce pays où Lyautey a laissé son âme, son cœur, la partie la plus précieuse de lui-même et auquel son nom est attaché à jamais).

L’extrême sobriété de ce tombeau, œuvre d’Albert Laprade, architecte de renom qui a façonné le paysage urbain du Maroc en particulier celui de Casablanca, n’a rien de commun avec ceux qu’on voit dans cette Cathédrale des armées. Cette sépulture a la simplicité et l’austérité des tombes musulmanes qui, sous l’effet des saisons et du vent, se confondent peu à peu avec le sol et disparaissent.

Monsieur le Maréchal, le seul vent auquel vous pourriez être sensible sous ces voûtes construites sous Louis XIV, ce vent qui chante les louanges des héros de notre histoire, ce souffle puissant, irrésistible, venu du fond des âge, Monsieur le Maréchal, ce vent est le souffle de l’histoire.

Hamdoulillah.