Lyautey et les Goums mixtes marocains
Au cœur des vastes étendues du Maroc, où s’entremêlent les sables du désert et les montagnes du Haut Atlas, un événement singulier a laissé une empreinte indélébile dans l’histoire du pays : la création des Goums mixtes marocains. Ce chapitre incontournable de l’histoire marocaine a pour maître d’orchestre le Maréchal Lyautey, dont la vision stratégique et l’habileté diplomatique ont su façonner et inspirer la création de ces unités.
Ces unités de ressortissants marocains furent créées pour organiser la sécurité de la plaine de la Chaouia (à l’est de Casablanca), et sont aujourd’hui encore en activité.
Le Général Lyautey et la création des Goums mixtes marocains
S’inspirant des principes énoncés par le Général Lyautey alors qu’il commandait en Algérie à Aïn Sefra (1903-1906) dans le Sud-oranias, avant de commander la Division d’Oran (1906-1910), c’est le 13 octobre 1908 que le Général Picquart, Ministre de la Guerre, prescrit dans une directive au général d’Amade, commandant les troupes au Maroc, de créer des goums recrutés dans les tribus marocaines.
Il s’agissait de créer des unités formées de ressortissants marocains pour organiser la sécurité de la plaine côtière de la Chaouia qui s’étend à l’est de Casablanca sans les placer sous l’autorité du Sultan, ni donner le sentiment, surtout à l’Allemagne, que la France occupe cette plaine en infraction au traité d’Algésiras de 1906 qui limite, conjointement avec l’Espagne, sa zone d’influence à huit ports marocains.
Nommé Commissaire Résident Général de France au Maroc en 1912, le Général Lyautey fixe définitivement, en 1913, le statut des goums, devenus goums mixtes marocains, qui succèdent aux goums de la Chaouia, en revenant aux principes qui avaient été quelque peu perdus de vues : « tout en participant aux opérations générales des troupes d’occupation, le rôle des goums est de constituer sur toute l’étendue des territoires occupés et notamment à leurs périphéries, un lien permanent entre les autorités militaires et la population indigène, de faciliter ainsi l’administration des tribus soumises et de nouer des intelligences avec les tribus extérieures ». Sont réaffirmés à cet effet : l’unité de commandement à chaque niveau de la hiérarchie territoriale par le Service de renseignement dont les goums sont le bras armé et le retour à une organisation interne, la plus légère possible, de ces unités.
Depuis, les goums mixtes marocains constituent une force permanente, classée par la loi de 1928 relative à la constitution des cadres et des effectifs de l’Armée française, dans les formations auxiliaires de l’Afrique du Nord. Ils constituent cependant une exception voulue par le général Lyautey car ils bénéficient d’une réglementation particulière qui les distingue des unités soumises aux règles générales de fonctionnement de l’Armée. Ils ont pu ainsi conserver les qualités innées du guerrier marocain qui ont fait merveille pendant les opérations de pacification du Maroc et dans les combats de la Seconde Guerre Mondiale.
Les Goums mixtes marocains aujourd’hui
Commémoration du centenaire de la création des Goums mixtes marocains, et discours du Président de « La Koumia ».
Le 8 mai 2008
Cérémonie annuelle au monument de la Croix des Moinats
commune de Basse sur le Rupt (88)
Discours du Contrôleur Général Sornat
Président de la Koumia
Aujourd’hui, 8 mai 2008, nous commémorons la victoire de 1945 mais aussi, devant ce monument où est gravé dans la pierre, leur gloire nous commémorons le centenaire de la création des Goums marocains.
Créés en 1908 par une instruction du général d’Amade, sur l’inspiration du général Lyautey, ils sont 6 puis 48 en 1934 année de la fin de la pacification du Maroc.
Bien que n’ayant pas combattu sur les fronts de la grande Guerre, ils participent en 1919 au défilé de la Victoire à Paris car ils se sont couverts de gloire au Maroc où ils ont participé à tous les combats. Ils y ont mérité 25 citations collectives et fait exceptionnel les Fanions des 10ème et 16ème Goums se voient remettre la fourragère de Théâtres d’opérations extérieures.
Organisés en quatre Groupements de Tabors Marocains, ils s’illustrent à nouveau au cours de la seconde guerre mondiale où leurs qualités de guerriers ardents et pugnaces ont fait merveille. Ils y ont étonné les Alliés et semé la crainte chez l’ennemi.
En Tunisie avec un armement désuet, ils ont été magnifiques. Les alliés leur font l’honneur, avec les autres troupes françaises, de défiler en tête à Tunis.
En Sicile le général Clark, chef d’État-major allié, les qualifie de « fabuleux combattants ». La Corse, l’Ile d’Elbe, l’Italie où ils ont un rôle de premier plan par leur ardeur dans l’exploitation dans la bataille du Garigliano.
Débarqués en Provence, ils défilent victorieusement à Marseille libéré avec le 4ème RTA. Ils y font plus de 8000 prisonniers et prennent plusieurs centaines de canons.
C’est ensuite au cours d’un hiver très rigoureux, les très durs combats des Vosges où après la poursuite les Allemands ont réussi à se réorganiser. Leurs souffrances sont adoucies par le magnifique accueil des vosgiens dont mon père qui a combattu ici même m’a toujours parlé avec beaucoup d’émotion.
Nous n’oublions pas les combats menés ici même après le franchissement de la Moselotte à Thiefosse ni ceux des FFI à la Pierre Piquante.
Enfin, l’Alsace et l’Allemagne.
Ils ont fait honneur une fois encore à leur devise « Ziddu l’gouddem » En avant. 39 citations collectives à l’ordre de l’Armée les ont récompensées.
En 1945, le général de Gaulle remet aux Tabors marocains un Drapeau qui sera décoré de la Légion d’Honneur et du Mérite Chérifien, la plus haute décoration militaire marocaine.
De 1948 à 1954, ils embarquent pour l’Indochine où ils sont engagés inconsidérément dans les combats terribles et désastreux de la RC4, puis dans toutes les opérations qui ont suivi. Ils y ont mérité 8 citations collectives.
Leurs derniers combats ont lieu en Tunisie, en Algérie et au Maroc.
En 1954, après s’être couverts de gloire, ils forment les premiers bataillons de l’Armée marocaine.
L’éloge fait au moment de leur dissolution résume leur épopée de moins de 50 ans :
« Leur rayonnement dans la pacification du Maroc, leur fougue dans la reconquête du sol français sous l’impulsion de chefs prestigieux, leur sacrifice en Extrême Orient ont inscrit une fulgurante épopée dans les plis de leurs drapeaux et de leurs fanions. »
Le 12 juillet 1943, Monsieur Puaux, Résident général au Maroc déclarait « Parmi les institutions militaires françaises au Maroc, il n’y a rien de meilleur et de plus formidable que le corps des goumiers marocains. La France a trouvé au Maroc les hommes les plus héroïques du monde »
Aujourd’hui, nous n’oublions pas les sacrifices de tous ceux qui ont combattu pour la Liberté et nous nous inclinons devants leurs morts, leurs Drapeaux et leurs Fanions. Nous pensons tout particulièrement aux goumiers, maounnines, moqqadmines et à leurs chefs tombés au champ d’honneur.
Sur 12000 combattants engagés pendant la seconde guerre mondiale, ils ont compté 1745 morts, 6589 blessés et 4 prisonniers.
La Koumia n’oublie pas la fidélité au souvenir des Communes reconnaissantes, toujours très attachées à notre cérémonie du 8 mai.
La KOUMIA
Association des Anciens de GOUMS MAROCAINS
et des Officiers des Affaires Indigènes en France
29 avenue du Général Leclerc
92100 Boulogne Billancourt